CARTERON : « On ne joue pas à la PlayStation… »

CARTERON : “Rester à Mazembe le plus longtemps possible…"

« EN DIRECT AVEC… » NUMERO 16 (Partie 2)

CARTERON : « On ne joue pas à la PlayStation… »

21 avril 2014

Vos commentaires sur Facebook en attestent, vous avez apprécié la 1ère partie de ce « En direct avec… » consacré à Patrice CARTERON. Les réponses courtes mais précises du coach de Mazembe ont convaincu la majorité d’entre vous quant à sa manière de concevoir le jeu des Corbeaux. Nous publions aujourd’hui la partie 2 de ce très long entretien accordé par le technicien français pour répondre à vos préoccupations. Sur la place des joueurs, le jeu aérien, les penalties, etc. Et là encore, gageons que vous n’allez pas vous ennuyer…

Pouvez-vous nous dire avec franchise si vous êtes libre pour le choix des joueurs dans un match ?

Totalement libre, j’ai la chance d’avoir une qualité de communication avec le Président Moïse KATUMBI qui me fait confiance dans mon travail et dans ce que je mets en place. Après, j’ai toujours le respect de lui présenter les choses, lui expliquer comment je vois  les choses et quel est pour moi le meilleur onze de départ. 

Pourquoi vous n'alignez pas le milieu du terrain venu du Malawi car il m'a beaucoup impressionné à Kinshasa ? - Pourquoi ne pas préparer Joseph KAMWENDO à de grandes rencontres ?

On a un effectif avec une très grande concurrence au niveau du poste de meneur de jeu. On a un joueur comme Gladson AWAKO et aussi Rainford KALABA qui peut jouer à ce poste. Joseph KAMWENDO doit assumer le fait qu’entre être bon dans un petit club et être bon à Mazembe il y a un gros écart. Il doit faire un gros effort pour arriver à nous convaincre tous qu’il est le meneur de jeu tant espéré.

Pourquoi avez-vous l'habitude de tester les nouveaux joueurs au cours des matches de la LINAFOOT au lieu de faire vos tests pendant les entraînements ?

Parce qu’on le fait déjà à l’entraînement et la meilleure réponse malgré tout c’est de voir comment le joueur va réagir lors de la compétition. C’est pour ça comme je l’ai dit, j’ai profité de notre avance en championnat pour pouvoir tester différentes formules et différents joueurs.

Au vu de votre préférence pour le 4-3-3 où vous donniez les clés de jeu à MPUTU, à qui comptez-vous les donner maintenant et pourquoi ?  Le départ de Trésor MPUTU constitue-t-il encore un vide important pour le reste de la compétition africaine ?

Bien sûr que le départ de Trésor a laissé un vide. On ne remplace pas facilement un joueur, qui, pendant dix années a marqué l’histoire du club. Je me dois de respecter son choix et son désir de pouvoir quitter le TPM, ce n’était pas mon choix. Par rapport à ça, je fais une grande confiance aux joueurs comme Rainford KALABA et Gladson AWAKO pour pouvoir assumer ce rôle de meneur de jeu.

Nous avons des doutes quand MAZEMBE va tirer un penalty (trois penalties ratés en 8ème de finale, deux l’année passée et un cette année), quelles sont les dispositions que vous prenez pour avoir  des tireurs spécialistes ? Les penalties qu’obtient Solomon pourquoi ne pas les lui laisser les tirer, quelle est votre politique en cette matière ?

Depuis mon arrivée on a énormément travaillé les penalties. Avant ce 8ème de finale, on en était à une trentaine de penalties depuis le début de la préparation. On en réussi beaucoup par exemple lors des matches amicaux en Zambie, on a fait 2 sur 2. Face aux Astres de Douala on avait marqué un penalty, je trouve que l’équipe est en progrès même s’il y a eu ce penalty raté par Jonas SAKUWAHA face à Sewé Sport. Quant à Solomon ASANTE, il est effectivement un joueur qui tire très bien, je suis persuadé que pour la suite il sera à même de les frapper. Après, ça dépend aussi dans quel état il se trouve à l’issue de la faute commise sur lui. S’il a besoin de récupérer, c’est délicat de lui demander de frapper...

« Dans le jeu aérien, on  a une des meilleures défenses d’Afrique »

Dans un match capital où Mazembe devait marquer un but pour se qualifier, vous avez constitué une attaque stérile faite d'un défenseur converti en attaquant (BOATENG) et un SAKUWAHA connu très en baisse alors que nous avons plein d'attaquants émergeants (BOLINGI, MERIKANI, ULIMWENGU, TRAORE,...). Quelles étaient vos motivations dans ce choix ? Pourquoi ne faites-vous ne pas jouer ensemble ASANTE et ULIMWENGU comme vous l'avez fait en deuxième mi-temps, c'était un choix gagnant.

Richard KISSI BOATENG est un milieu gauche reconverti en latéral gauche non pas un défenseur reconverti en attaquant. Et quand à Jonas SAKUWAHA, il était notre meilleur attaquant depuis le début de la saison. Il avait notamment marqué contre les Astres de Douala. Cheibane TRAORE revenant de blessure n’étant pas opérationnel, Mbwana SAMATTA blessé, il m’a semblé logique de partir avec cette attaque-là qui je le rappelle nous avez donné entièrement satisfaction avec la victoire 3-0 quelques semaines auparavant contre Les Astres de Douala. Ensuite ASANTE et ULIMWENGU sont à la base des joueurs beaucoup plus à l’aise l’un et l’autre sur le couloir droit. C’est également une bonne idée de les associer sur les ailes ensemble sur certains matches.

Notre équipe – surtout la défense – perd la majorité des duels aériens et par manque de marquage on accompagne l’adversaire jusqu’à la surface (voir face à Séwé les deux buts encaissés) ! Qu’en dites-vous ?

Là je suis totalement en désaccord, on a une défense, qui, dans le domaine aérien est certainement ce qui peut se faire mieux en Afrique. J’ai du mal à comprendre cette question...

Pourquoi en match éprouvez-vous énormément de difficultés à faire vos changements et pourquoi vos joueurs ne sont pas souvent aptes physiquement à la seconde mi-temps ?

Nous sommes venus en Zambie justement pour faire en sorte que physiquement les joueurs progressent. On a effectivement constaté qu’on avait des difficultés en deuxième mi-temps… Je n’ai aucune difficulté à faire des changements, mais sur un match on ne joue pas à la PlayStation.  J’essaye de faire en fonction de ce que je ressens. Je pense qu’à chaque fois que j’ai fait des changements ils se sont avérés payants. Par rapport à ça, je ne veux pas changer trop rapidement car selon moi se précipiter n’est pas la meilleure façon de faire.

« Il fallait repartir avec de nouveaux jeunes joueurs… »

Pourquoi avec cet effectif Mazembe n’arrive pas à marquer beaucoup de buts ?  Pourquoi vous avez tout changé chez Mazembe ?

D’accord sur le fait qu’on a un potentiel offensif qui doit nous permettre de marquer beaucoup plus de buts. Ça va venir avec le gros travail qu’on est en train de fournir. Quand je vois le nombre d’occasions qu’on arrive à se créer, le jour où nos attaquants vont prendre confiance, je suis persuadé que ça va être payant. Je n’ai pas souhaité tout changer chez Mazembe, j’ai juste fait le constat, en arrivant, que l’équipe était en fin de cycle, car plus le temps passait plus le résultat était difficile. Il fallait repartir sur un nouveau cycle avec de nouveaux jeunes joueurs pour que Mazembe puisse dans les années à venir avoir une équipe très performante. 

Quelle est la situation de Jonathan BOLINGI qu'on ne revoie plus ces derniers temps, alors que sa dernière prestation était jugée satisfaisante par plus d'un ?

Je suis très satisfait de sa progression, il m’a donné entièrement satisfaction quand on a fait appel à lui notamment contre Les Astres de Douala. Mais aujourd’hui en tant qu’avant-centre, il est encore en deçà d’un joueur comme Mbwana SAMATTA. A lui de continuer à travailler pour avoir sa chance à un moment ou un autre. 

Pourquoi un dispositif différent pour le match à l’extérieur et un autre à domicile ? Parfois votre changement n'a pas été payant voire médiocre, exemple la finale de la C2. Vous meniez déjà 2-0 mais vous avez décidé de sortir SINGULUMLA pour faire monter KALABA qui est venu tout gâcher au milieu de terrain et l'équipe n'a plus marqué le 3ème but jusqu'à en encaisser un…

C’est votre constat... L’équipe est à la recherche d’un équilibre à l’extérieur raison pour laquelle  je recours à un dispositif différent à l’extérieur qu’on n’a pas encore trouvé, c’est le premier point. Ensuite pour revenir sur la finale que j’ai revue plusieurs fois, on a eu une bonne dizaine d’occasions en première comme en deuxième mi-temps, on a manqué énormément de réussite. Je ne pense pas que les changements aient fait en sorte que le ballon ait tapé le montant ou la barre et ne soit pas entré. On a juste manqué de réussite et malheureusement on a pris ce but à la fin.

Pourquoi vous n’alignez pas Solomon ASANTE comme titulaire à l’extérieur, que lui reprochez-vous ?

Je lui ai tout simplement dit que j’attendais de lui le même investissement à l’extérieur qu’à domicile. Je suis persuadé qu’il va prendre conscience de son potentiel et qu’il est à même de faire les mêmes matches qu’à domicile ce qui n’a pas encore été le cas. Je compte énormément sur  lui effectivement.

Etes-vous certain que votre jeu est meilleur que celui de Lamine NDIAYE qui avait amené Mazembe jusqu’à la finale de la Coupe du monde des clubs ?  Et combien de temps faut-il encore attendre pour voir ce changement de jeu dont vous parlez souvent ?

« Oui, on doit faire mieux en qualité de jeu »

Je ne peux pas comparer le travail de Lamine NDIAYE que j’apprécie énormément. On ne peut pas non plus comparer une équipe qui est allé en finale de la Coupe du monde des Clubs de la FIFA en 2014, le plus haut niveau. On est 4 ans plus tard on n’a pas les mêmes joueurs. La seule chose que j’ai à dire, c’est que j’ai axé ma préparation sur l’efficacité. On est qualifié pour les play-offs en Linafoot et les quarts de la finale de la Ligue des Champions de la CAF, mais j’ai parfaitement conscience qu’à l’heure où je vous parle on doit faire beaucoup mieux en terme de qualité de jeu. J’ai toujours mis en priorité le réalisme et l’efficacité qui nous permettrons d’avoir de belles ambitions.

Pourquoi, à chaque rencontre quand vous perdez vous dites que vous êtes en train de faire tourner l'équipe ?

Déjà, je trouve que ce constat assez sévère. Depuis que je suis à Mazembe, on peut compter sur les doigts d’une main les défaites que j’ai connues avec l’équipe. En finale aller contre CS Sfaxien je ne pense pas avoir fait tourner l’effectif… Et depuis on a subi une seule défaite contre Don Bosco en championnat. J’ai rarement invoqué le fait de faire tourner, je me suis expliqué sur ce qui était important pour moi : tester l’ensemble du groupe en faisant tourner. Désormais, j’ai une idée plus précise de l’effectif. 

Marie Benoit KAZADI – Mbuji-Mayi, Cyril AKUMA – Mbuji-Mayi, Prince TSHIKIND – Lubumbashi, Jean Claude NGOIE MWALIMU – Kinshasa, John KATUMBA – Lubumbashi, Polycarpe NYEMBO – Kinshasa, Clément KADIMA KITWA – Lubumbashi,  Yannic O'BAWA – Luena, Daniel KAMOMA – Montréal, Tiann NKAWA – Uvira, Paulin KAYUMBA – Dortmund/Allemagne, Louis TSHISOLA – Lubumbashi, Jean de Dieu TSHISWAKA – Dallas, Texas/USA, Eric MUYEYE – Kinshasa, Lucien SUNGURA – Bukavu, Flory KABAMBA NUMBI – Kinshasa, Dieudonné BANZA – Lubumbashi, Didier BULAMBO – Bukavu, André MALUK – Lubumbashi, Monia INANSALA– Likasi, Cédrick FARAY – Lubumbashi, Jean-Pierre KILELE – Kolwezi, Augustin KAZADI – Kindu, Olivier BAKA – Matadi, Jean KITOKO – Kinshasa, Isidore KIKUKAMA – Bukavu, Ghislain LUBULA – Kinshasa, Jean ZAWADI – Butembo, KASANGANA MBENGU The Best – Mbuji-Mayi/Kasaï-Oriental, JC WITANDAY – Bunia, Tony Moma SHAKAYOMBO – Kinshasa, Laurent CIMWISH – Lubumbashi, Ray – Kinshasa, Christian LUKOO – Sharjah/Emirats, Christian KIBAMBE – Gaborone, Hubert Patrick MUKENDI – Kinshasa, Dieudonné Been MASUDI – Lubumbashi, Serge MUTOKA – Kinshasa, Jacques EMUNDU – Kinshasa, Léonard NGWEJ – Lubumbashi, Nicolas TSHIBUMBU – Kinshasa, Crispi' NGUNZA – Bukavu, Gray LETEMBET – Brazzaville, Clovis OMBENI – Bukavu, Fabrice MPOYO – Likasi, Carine KAMIN NABUND – Lubumbashi, Welcome KATUMBI– Johannesburg, Jean NGOY KYUNGU – Lubumbashi, Richard MAKELELE – Goma,Julienne DJATA – Mali,Freddy LUFUNGULA – Kinshasa, Dady Eugene NYEMBUE – Kinshasa, Eric NDAYANGO – Beni /Nord-Kivu, Guedaly KYUNGU – Lubumbashi, Dezy MWANGA – Kinshasa, Guy Aimé MUKOSA MWAMBA – Lubumbashi, Laurent LUHEMBWE – Lubumbashi, Eloge MBAYO – Johannesburg  (Afrique du sud),Arthax Trésor WILONDJA MBISO – Kinshasa, Jean de Dieu Kamala – Butembo, Fabrice MUAMBA FMK – Lubumbashi, Jacques SIBONGWERE – Goma, Francis Aston DJEMES – Luanda/Angola, Néhémie MUSITU – Kinshasa, Léopold KALUNDA – Lubumbashi, Joel MALOBA – Lubumbashi, John MPOYI NGANDU – Kinshasa, Arthax Trésor WILONDJA MBISO – Kinshasa, Sidi Balotelli Sidi TRAORE – Mauritanie, Daniels KALONJI – Kinshasa, Mim's Fortune MULONGO – Lubumbashi, Arafat TSHAMUTA – Lubumbashi, Elisée BATULAU – Lubumbashi

Après près de 10 mois à la tête du staff technique d'un club de haut niveau, quelle différence majeure faites-vous entre coacher un club et une sélection nationale ? Quelle fonction vous semble moins difficile ou moins passionnante ? N'était-il pas opportun de commencer par un autre club que celui de la trempe de Mazembe, eu égard à ses ambitions et aux exigences de ses fans ?

Au contraire tout est une question d’expérience, j’ai toujours aimé aller très vite. En tant que jeune entraîneur,  j’ai sauvé deux clubs de la relégation en France, j’ai fait monter l’équipe de Dijon avec le plus petit budget en L1 française. J’ai également pu avec la sélection du Mali, conduire un effectif renouvelé à plus de 60% et beaucoup des jeunes pour obtenir une 3ème place à la CAN. Autant d’expériences qui me permettent de penser que mon travail peut être aussi efficace pour un club comme Mazembe. Les deux métiers sont passionnants, mais totalement différents parce que l’un est plus exigeant au quotidien et l’autre un travail beaucoup plus axé sur l’observation des joueurs.

« J’aimerais rester à Mazembe le plus longtemps possible »

Selon  votre expérience footballistique, combien de temps faut-il pour un coach afin qu'il puisse imprimer son système de jeu à son équipe...

C’est difficile à dire, ça dépend de la confiance de l’équipe. Encore une fois, j’ai d’abord misé sur le réalisme et l’efficacité parce que je savais que si on passait en quarts de finale, on allait pouvoir renforcer l’équipe et travailler beaucoup plus. On allait avoir une idée précise d’un groupe en grande partie renouvelé. J’espère que dans quelques semaines on pourra avoir une grande progression dans le jeu.

Pensez-vous rester longtemps chez les Badianguenas, même si une offre alléchante se présentait ailleurs ?

J’ai eu des offres alléchantes et le Président Moïse KATUMBI est au courant. J’en ai eu régulièrement mais j’avais vraiment la volonté de rester à Mazembe et j’aimerais y rester le plus le longtemps possible. 

Qu'est-ce qui vous a motivé pour venir entraîner Mazembe, alors qu'il y a beaucoup de clubs en Afrique ? C'est le pognon ou l'organisation du club ?

C’est le fait d’être dans un club que le président a organisé comme un club européen avec un vrai potentiel. Après, quand je suis venu à Mazembe j’ai toute suite été sous le charme, venir à Kamalondo et voir l’ambiance au stade, quelque chose qui m’a rappelé personnellement mes années de joueurs en Angleterre avec Sunderland. Je trouve aussi qu’exercer en tant qu’entraîneur à Mazembe c’est réellement une chance.

Que pensez de cette opinion qui estime que vous êtes bon comme sélectionneur et non comme entraîneur, référence faite à votre succès avec l’équipe nationale du Mali ?

J’ai eu autant de succès en club en tant qu’entraîneur qu’en tant que sélectionneur. L’année dernière on a été champion du Congo, on a gagné la Super Coupe du Congo, c’était loin d’être gagné quand je suis arrivé... J’ai envie de dire que le bilan est encourageant, j’espère encore conduire Mazembe le plus loin que possible dans les semaines qui viennent...

Hervé MUKONKOLE – Kinshasa, Jean Chriso KABAMBA – Lubumbashi, Serge LUMUNA KITA – Jérusalem, Patrick CHIDA – Kinshasa, Freddy FERNANDO – Angola, Héritier BOROTO – Bukavu

(A suivre)

A lire également